空手道 教範 karate dô kyôhan
écrit par Gichin funakoshi
traduit par Tsutomu ohshima
ce livre a été édité par France shotokan en 1979
Un Japonais, Tsutomu Ohshima, aura mis plus de 10 années pour traduire ce livre écrit par le sensei. C'est ce qui doit vous permettre de bien réfléchir avant de vous lancer à traduire 1, voire plusieurs mot de Japonais. Je reste très humble dans ma traduction et ne prétend pas avoir la finalité. Je tente tout simplement de vous ouvrir les yeux et de vous apporter un sens aux termes utilisés dans les arts martiaux.
Je vous conseil de lire ce livre sans modération et je vous invite à vous en inspirer pour votre pratique et en général pour votre quotidien. J'ai voulu sélectionner les préceptes qui pourraient vous servir en dehors du dôjô mais si vous les considérez bien, ils sont tous transposables dans votre vie de tous les jours.
Extrait du livre écrit par Gichin Funakoshi " karate dô kyôhan "
KARA 唐 ET KARA空
Le Karate-dô est un art martial propre à Okinawa. Si, dans le passé, li a été confondu avec la boxe chinoise à cause de l'utilisation du caractère 唐 dans son nom, c'est en fait au cours du dernier millénaire, à Okinawa qu'il se développa, se perfectionna et donna naissance à l'art martial que nous connaissons aujourd'hui, à travers les recherches et les entraînements des maîtres et des experts. Par conséquent, li est parfaitement justifié de le présenter comme un art martial d'Okinawa. On peut se demander pourquoi le caractère 唐 fut gardé si longtemps. Je crois qu'au temps où l'influence de la culture chinoise était à son apogée au Japon, beaucoup d'experts en arts martiaux se rendirent en Chine pour pratiquer la boxe chinoise. Grâce à leurs nouvelles connaissances, ils modifièrent l'art martial existant alors appelé "Okinawa-te", éliminant certains points faibles, en améliorant d'autres et le transformèrent ainsi en un art accompli. On peut penser qu'ils considéraient que 唐 était un nom nouveau plus approprié. En effet, même dans le Japon contemporain, beaucoup de gens sont impressionnés par tout ce qui est étranger, et on peut aisément imaginer en quelle haute estime on tenait à cette époque, à Okinawa, tout ce qui venait de Chine. Même du temps de la jeunesse de l'auteur, l'absence dans la maison d'une grande famille d'un ensemble complet de mobilier chinois et de sa garniture était un sérieux obstacle à son rayonnement social. Dans ce contexte, li est évident que le choix de l'idéogramme l'époque, à Okinawa, tout ce qui venait de Chine. Même du temps de la jeunesse de l'auteur, l'absence dans la maison d'une grande famille d'un ensemble complet de mobilier chinois et de sa garniture était un sérieux obstacle à son rayonnement social. Dans ce contexte, li est évident que le choix de l'idéogramme 唐 avec la signification de "Chinois" était motivé par le désir d'exotisme.
Suivant la tradition, l'auteur a également dans le passé, utilisé le caractère 唐 . Cependant, à cause de la fréquente confusion avec la boxe chinoise et, parce que l'art martial d'Okinawa peut maintenant être considéré comme japonais à part entière, li est impropre et en un sens humiliant de continuer à utiliser 唐 . Pour cette raison et en dépit de nombreuses protestations, nous avons abandonné l'usage de 唐 pour celui de 空.
LA SIGNIFICATION DE KARA 空
Le premier sens attaché à 空 indique que le Karate est une technique qui permet de se défendre à l'aide de ses mains et de ses poings nus, sans arme.
En second lieu, de même que seul un miroir limpide reflète sans distorsion ou que seule une vallée calme peut sans le déformer, renvoyer l'écho d'un son, celui qui désire étudier le karate-dô doit éliminer de lui-même les pensées égoïstes et mauvaises, car li ne pourra comprendre ce qu'il reçoit qu'avec un esprit clair et une conscience pure. Ceci est un autre élément de "kara" dans karate-dô.
Ensuite, celui qui veut étudier le karate-dô doit s'efforcer d'être intérieurement humble et extérieurement paisible. Cependant, une fois qu'il a décidé de se dresser pour défendre la cause de la justice, alors il doit avoir le courage exprimé dans ces mots "Senman nin to iedomo ware, yukan" - " même face à dix millions d'adversaires, j'irai ". Ainsi, il sera comme la tige de bambou vert, vide (kara) à l'intérieur, droit et avec des nœuds, c'est-à-dire, sans égoïsme, paisible et modéré. Cette signification est aussi contenue dans l'élément "kara" de karate-dô.
Enfin, sur un plan plus fondamental, la forme de l'Univers est le néant (Kara), par suite le néant est forme lui-même. Il y a beaucoup d'arts martiaux, Jûdô, kendô, sôjutsu (technique des lances), bôjutsu (technique des bâtons), et d'autres encore. Il n'y a aucune exagération à dire que le sens original de karate-dô est celui-là même qui est la base commune de tous les arts martiaux. La forme est le néant, le néant est la forme elle-même. Le "kara" de karate-dô a ce sens.
DE LA TECHNIQUE (JuTSU) A LA VOIE (Dô)
Le pouvoir offensif et défensif extraordinaire du Karate-dô est bien connu. Le karate-dô est un art qui permet de vaincre un ennemi par une attaque unique du poing ou du pied, sans avoir recours à une arme. La valeur de l'art dépend de celui qui l'utilise. S'il est utilisé pour une cause juste, alors sa valeur est grande, par contre, s'il en est fait un mauvais usage, alors il n'est pas d'art plus nuisible et malfaisant que le Karate.
Il fut un temps ou le département de police d'Okinawa tenta d'introduire la pratique du Karate parmi ses membres, mais le projet fût abandonné à cause des profondes inquiétudes que le danger potentiel de cet art suscita. En d'autres circonstances, les regrettés amiraux Rokuro Yashiro et Norikazu Kanna proposèrent que le personnel de la marine apprenne le Karate, mais la encore, la crainte de le voir utiliser dans les disputes entre marins conduisit à l'abandon de cette suggestion. L'usage immodéré de l'art du Karaté provoquerait l'inquiétude du grand public et on ne peut nier les dangers potentiels qu'il présente. Cependant, il serait regrettable que l'étude de cet art mystérieux, dont on peut être fier à juste raison, ne soit pas poursuivie sous le prétexte qu'il est trop dangereux. L'origine de ces inquiétudes est due en grande partie aux conceptions erronées d'instructeurs déficients, qui insistent de manière irréfléchie sur la pratique des techniques, plutôt que sur les aspects spirituels de la voie, et également à l'attitude erronée de ceux qui étudient le karate uniquement comme une technique de combat. Il y a même des cas extrêmes où les élèves sont encouragés à utiliser leur Karate dans des bagarres. Des inepties dangereuses telles que "Tu ne pourras jamais progresser ou améliorer tes techniques sans quelques expériences de combats réels" ou "Si tu n'es pas capable de battre Untel, alors tu ferais mieux d'abandonner l'entraînement du Karate", sont réellement préjudiciables à la réputation du karate. Cependant, ce genre de paroles ne fait que révéler le manque de jugement de ceux qui les prononcent, qui, en fait, ne connaissent rien du karate-dô. Conçu correctement, enseigné et étudié dans le vrai esprit du karate-dô, cet art est non seulement l'antithèse absolue d'un danger réel, mais encore, il n'admet pratiquement pas d'équivalent en tant qu'art martial (Budô) complet.
Les drogues puissantes sont dangereuses. Le poison est effrayant. Cependant, personne dans le corps médical moderne ne préconise l'abandon de ces produits. Le danger des drogues puissantes et des poisons dépend de leur usage et, lorsqu'ils sont utilisés correctement, ils peuvent être très utiles. Le karate-dô, improprement utilisé, est certainement dangereux et pernicieux. Mais également, parce qu'il est très dangereux, le Karate-dô peut aussi être bénéfique lorsqu'il est utilisé à bon escient. Lorsqu'un malade reçoit prescription de prendre une drogue dangereuse, on doit lui faire comprendre la nature du médicament et lui enseigner comment l'utiliser correctement. De même, ceux qui veulent étudier le karate-dô doivent être éclairés sur sa nature et instruits de son usage approprié. La compréhension correcte du Karate et son usage approprié, constituent le karate-dô.
Celui qui étudie avec sincérité dans cette voie (Dô), et comprend l'essence du Karate-dô n'est jamais amené à prendre part à un combat. Une attaque du poing ou un coup de pied détermine la vie ou la mort. Par suite, le Karaté n'est proprement utilisé que dans ces rares occasions où l'on doit détruire l'adversaire ou être détruit soi-même. Ce genre de situation peut se présenter une fois au grand maximum dans la vie d'une personne ordinaire, en conséquence, l'occasion d'utiliser les techniques du karate peut se présenter de manière unique, voire jamais.
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A travers l'homme, les techniques deviennent un art. Je dois répéter avec force: ne faites pas un mauvais usage des techniques de karate.
Le karate véridique, c'est-à-dire le karate-dô, a pour but, intérieurement, d'entraîner l'esprit et de développer une conscience claire afin de nous permettre de faire face au monde en toute lucidité, tout en développant extérieurement une puissance susceptible de pouvoir vaincre de féroces bêtes sauvages. L'esprit et la technique deviennent UN dans le véritable Karaté.
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Ceux qui suivent la voie (dô) du karate, doivent accorder une importance capitale à la courtoisie. Sans la courtoisie, l'essence du karate-dô est perdue. La courtoisie doit être pratiquée non seulement au cours des périodes d'entraînement, mais également dans la vie quotidienne. L'élève en karate doit être humble pour recevoir l'enseignement. On doit dire que toute personne présomptueuse et vaniteuse n'est pas qualifiée pour suivre la voie du karate. L'élève doit toujours être sensible et réceptif aux critiques des autres; il doit constamment pratiquer l'introspection et admettre franchement tout manque de connaissance plutôt que de prétendre connaître ce qu'il ne sait pas. Ceux qui suivent la voie du karate ne doivent jamais abandonner un esprit humble et des manières courtoises. Les individus qui aiment à se vanter d'avoir acquis de petits talents ont l'esprit étroit et ceux qui ont des connais- sances limitées et prétendent être des experts sont des enfants. C'est à cause du grand nombre de faux experts en arts martiaux qui courent le monde que le public tend à ignorer les vrais ou les considère comme des brutes. Par suite, de nombreux pratiquants sérieux des arts martiaux se trouvent gênés. Les élèves en karate-dô doivent toujours conserver ces remarques à l'esprit. Ceux qui suivent la voie du karate, doivent développer courage et force d'âme. Ces qualités n'ont rien à voir avec les actions spectaculaires ou le développement de techniques puissantes en tant que telles. L'accent doit être mis sur le développement de l'esprit plutôt que sur celui des techniques. Dans une période de grave crise publique, on doit avoir le courage, si cela est nécessaire pour le bien de la justice, de faire face à des millions d'adversaires "Senman nin to iedomo ware yukan". Pour l'élève en karate-dô, l'indécision est la pire des choses.
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Au début du printemps 1922, le Ministère de l'Éducation organisa la première représentation nationale d'athlétisme à Tokyo. Je fus chargé par le département de l'Éducation de la province d'Okinawa, de préparer la démonstration de karate qui devait être faite à cette occasion. J'acceptai cette mission et je préparai trois grands parchemins décrivant l'histoire du karate et illustrant ses kata et ses techniques. C'est ainsi que je partis pour Tôkyô avec les trois parchemins en tant que représentant officiel. J'avais espéré rentrer à Okinawa à la fin de la manifestation, mais plusieurs groupes de personnes: la famille Sho (descendant du dernier roi d'Okinawa Sho Tai), le Kodôkan, l'Académie militaire, le Barreau, la Société de recherche sur l'éducation physique de l'Université, et d'autres organisations et associations, insistèrent chaleureusement pour que je reste à Tokyo et que je donne des cours plus approfondis sur le karate Bien que je ne me sentisse pas digne de cette tâche, j'étais convaincu que c'était dans l'intérêt du karate et en conséquence, j'effectuai plusieurs voyages à travers le pays, donnant des conférences et faisant des démonstrations afin de rendre cet art populaire.
Au cours de cette période, le Maître artiste Hoan Kosugi me fit un jour cette réflexion: "Si vous avez à retourner à Okinawa, nous allons avoir des difficultés à poursuivre notre entraînement à cause du manque d'instruction, vous pouvez peut-être laisser quelque chose avec nous, en écrivant un ouvrage expliquant cette voie (Dô)".
Je fus profondément ému par cette demande et comme j'avais, par ailleurs, souvent rédigé des notes sur certains points particuliers du Karaté, je commençai de consacrer mes soirées à écrire un livre, qui parut finalement en Novembre 1922, sous le titre "Ryukyu Kempo Karaté". Ce petit livre fut le premier ouvrage écrit jamais publié sur le karate. A travers lui, le Karaté, autrefois secret, put s'ouvrir au monde. Cependant, l'année suivante, les épreuves du livre furent détruites au cours du grand tremblement de terre de Kanto en 1923, ce qui conduisit à la publication d'une édition révisée sous le titre de "Rentan Goshin Karaté-Jitsu" (le renforcement de la volonté et l'auto-défense à travers les techniques du Karaté). Cette édition fût lue par l'Empereur lui-même, ce qui est bien sûr un honneur, non pas pour moi, mais pour le karate. En d'autres occasions, à la fin de 1924, je fus retenu pour les manifestations athlétiques internationales de Tôkyô et je fis une démonstration au Palais Jichi (hôtel du gouvernement) à Ueno, Tôkô. Le 20 Mars 1928, sur invitation de la Maison impériale, je fis une démonstration avec quinze de mes élèves à l'hôtel de Sainei-Kan dans l'enceinte du palais.
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LA VALEUR DU kARATe
EN TANT QU'ENTRAÎNEMENT ATHLÉTIQUE
La nature du karate est telle que le corps est sollicité dans toutes les directions, contrairement à ce qui est demandé par exemple aux bras pour l'aviron et aux jambes pour le saut. En karate, li ny' a aucun intérêt à développer exclusivement un seul côté du corps. En fait, un des avantages du karate est le développement équilibré et harmonieux du corps.
Dans la plupart des cas, une minute ou deux suffisent à exécuter un kata. De plus, au cours de la progression de l'entraînement, les mouvements deviennent de plus en plus rapides et l'entraînement de plus en plus vigoureux dans son ensemble, ce qui fait qu'il est possible d'exécuter un exercice relativement complet pendant un temps assez court. Ce type d'exercice est idéal pour beaucoup de ceux qui désirent s'entraîner mais ne disposent pas du temps nécessaire. La durée restreinte des exercices de karate est un deuxième avantage à son actif.
Aucun autre type d'entraînement, que ce soit le Jûdo, le Kendô, le tir à l'arc, la natation ou l'équitation, en peut se pratiquer en un lieu quelconque et à n'importe quel moment aussi aisément que le karate. La plupart des sports requièrent des emplacements de grandes dimensions, des équipements spéciaux ou des partenaires et, de ce point de vue, le karate est très souple et très adaptable. L'emplacement est indifférent, aucun équipement et même aucun partenaire ne sont nécessaires.
On peut le pratiquer dans un jardin, dans une chambre, dans un hall ou tout autre endroit selon son désir. Ceci constitue un troisième avantage du karate.
D'habitude, un exercice adapté aux hommes ne convient pas aux femmes et ceux qui sont adaptés aux femmes ne conviennent pas aux hommes ; les exercices destinés aux convalescents sont insuffisants pour les personnes bien portantes et de même, les exercices convenant aux jeunes gens en bonne santé sont trop éprouvants pour les personnes âgées ou pour les enfants. Le karate peut être pratiqué par les personnes affaiblies, par les femmes, les enfants et les personnes âgées. En d'autres termes, comme chacun peut adapter l'exercice à ses capacités et comme chaque unité d'entraînement a une durée variant d'une à deux minutes, li n'y a aucun danger de surentraînement ou d'épuisement physique. De plus, au fur et à mesure que le corps est éduqué et que les techniques deviennent plus élaborées, les mouvements deviennent naturellement plus puissants, de sorte que la quantité d'effort devient suffisante, même pour les jeunes gens à l'apogée de leur force physique. L'ampleur des exercices se développe naturellement au cours du processus d'entraînement ; voilà un élément que je citerai comme quatrième avantage du karate.
Le fait que le karate puisse être pratiqué seul ou en groupe est un aspect qui lui est propre. Enfin, même si l'on ne considère que le point de vue de l'exercice physique et sa valeur pratique, la suite de mouvements des bras et des jambes ayant une signification spécifique et les nombreuses variations des différentes séquences des kata représentent, en ce qui concerne leur étude, autant de défis à relever. Tout en y prenant plaisir et tout en étant entièrement pris par leur étude, on profite de leur acquis sans même s'en rendre compte.
La valeur du karate en tant que méthode d'éducation physique peut aisément se prouver par des tests scientifiques; après un an seulement d'entraînement, on peut facilement se rendre compte des progrès et reconnaître l'amélioration de sa condition physique par rapport à ce qu'elle était avant la pratique du karate. Mes professeurs estimés, les regrettés Maîtres Shishu (en japonais Itosu) et Azato avaient été tous deux des enfants très faibles. Ils s'initièrent à la pratique du karate pour améliorer leur santé; ils se développèrent si bien qu'ils devinrent méconnaissables. Ils vécurent très longtemps et devinrent, de notre temps, de vieux Maîtres respectés. Maître Shishu vécut jusqu'à l'âge avancé de quatre-vingt-cinq ans et Maître Azato
jusqu'à quatre-vingts ans. Le professeur de Maître Azato, Maître Matsumura vécut jusqu'à quatre-vingt-dix ans. D'autres experts de karate, comme les Maîtres Yamaguchi, Aragake, Chibana, Nakazato, Yahiku, Tokashiki, Sakihara et Chinen, vécurent tous au-delà de quatre-vingts ans. Ces exemples sont très caractéristiques du rôle du karate comme méthode supérieure pour conserver la santé.
à suivre...
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